L'amant russe
Auteur Gilles LEROY Lecture Mars 2002
Edition Mercure de France Création Fiche Mars 2002
Parution 2002

 

Origine France
Traduction  


"Je" (on ne saura jamais son prénom) accompagne un groupe de communistes français en pèlerinage "encadré" en URSS. Lors de leur escale à Leningrad, il croise le regard de Volodia, jeune étudiant-ouvrier russe qui apprend le français en cours du soir. C'est le coup de foudre. "Je" veux se lancer avec toute la fougue et l'insouciance de l'adolescence dans cet amour, mais il se heurte d'abord à la réserve de Volodia, plus calme et plus conscient des dangers et des obstacles, même si tout autant amoureux (?). Il faut ruser pour se cacher des autorités soviétiques, pour se défier du regard des visiteurs français, se méfier de la jalousie et de la mesquinerie, se déjouer de la dénonciation, et se soustraire de la vindicte populaire (nous sommes en 1974-77 environ). A force d'attendre son amant dans sa chambre d'hôtel, de le chercher où il n'est pas, "je" se consume d'amour. Et quand Volodia se décide enfin, ce sont les toilettes publiques ("abri international des amours les plus sublimes, condamnées à l'abjection par l'intolérance" J.-P. Tison, Lire) qui abritent des amours fugaces mêmes si intenses.


Les premières amours adolescentes se vivent toujours avec un délicat mélange de passion et d'appréhension. Mais si le coup de foudre s'établie entre un ado de 16 ans et un homme de 26 ans, on imagine sans mal les difficultés, surtout s'il s'agit d'un lycéen Français et d'un étudiant Russe dans Leningrad de l'ère Brejnev, au plus fort de la guerre froide et de l'obscurantisme totalitaire soviétique. Une dizaine d'année après les faits, le Français croit reconnaître son amant dans une délégation soviétique lors d'un colloque, mais ce n'est pas (ou plus ?) le même nom ! Il prend sa plume pour narrer ses souvenirs et ses sentiments, et nous offre son récit encore quelques années plus tard, près de 25 ans après l'histoire. Gilles Leroy décrit magistralement dans ce roman toute l'impatience, la violence, la passion, l'exigence du désir adolescent : "C'est alors que je l'ai vu. J'ai su qu'il n'y aurait plus rien au monde. J'ai frissonné, la sueur s'est glacée sur mon corps. Quelque chose naissait et je n'avais plus peur". Et l'évolution, la malléabilité de la jeunesse (avec la réflexion de l'âge adulte ?) : "Le désir m'apprenait cela : l'urgence n'existe pas. On passe sa jeunesse à projeter la vie en une course d'étapes prioritaires, pour s'apercevoir finalement que les priorités sont secondaires. Et quand on l'a compris, c'est trop tard. Les saisons pour le secondaire sont passées."
"On peut cesser de vivre à seize ans. Pour certains c'est même plus tôt". Vous trouvez ça mélo ? Si vous saviez combien de morts vivants vous entourent, à jamais émerveillés et assassinés par un premier amour clandestin (J.-P. T.).
N.B.: Pour cette critique, je me suis fortement inspiré de l'article de Jean-Pierre Tison, (Lire, n°302, février 2002, p72), qui m'a donné envie de lire ce roman. Le dernier paragraphe est même totalement reproduit de son article. Merci à lui.


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