Les jours fragiles
Auteur Philippe BESSON Lecture Octobre 2004
Edition Julliard Création Fiche Octobre 2004
Parution 2004

 

Origine France
Traduction  
 


La souffrance, celle du corps, je pourrais finir par m'y habituer, par en faire une compagne. Je la dompterai ou elle m'emportera. Mais la souffrance du coeur, on ne s'y accoutume jamais. Elle est insidieuse. Et bien plus dévastratrice.
Ph. Besson, Les jours fragiles.


"Avril 1891, Arthur Rimbaud souffre d'une tumeur au genou. Il quitte le Harar pour regagner la France. Juillet de la même année il est amputée d'une jambe à l'hôpital de la Conception, Marseille. Il remonte alors à Roche dans la ferme familiale pour une lente agonie qui se terminera à Marseille le 10 novembre 1891. Du jour de son retour à celui de sa mort, Isabelle, sa soeur cadette restera à son chevet, aimante et fidèle, patiente et admirative. Les jours fragiles est le journal imaginaire d'Isabelle pendant cette courte période de la vie du poëte"


Philippe Besson a bien préparé son coup : l'étude biographique de l'agonie de Rimbaud a été soigneusement menée. Il n'en reste pas moins que ce "Journal intime d'Isabelle" n'est que pure conjecture, même si plausible, du moins en partie. Car "la vérité est que Rimbaud nous échappe, s'échappe. Il nous nargue." (L. Forestier)
Cette période de l'agonie de Rimbaud est surtout connue par le témoignage d'Isabelle et la correspondance entre Arthur, Isabelle et Mme mère. Les archives de l'Hôpital de la Conception ont été détruites. Nous savons également qu'il faut se méfier du témoignage d'Isabelle qui a toujours voulu embellir la vie de son frère à l'aune de ses propres convictions bigottes, essayant notamment de biffer "ce qui n'est pas autorisé, approuvé par de bons et honnêtes parents" (comme Mme Rimbaud l'écrivit à Verlaine). D'ailleurs Besson le dit haut et clair par la bouche d'Isabelle : "... quand le temps adviendra de livrer mon frère à la postérité, de témoigner de ce que furent sa vie et son oeuvre, je devrai faire des accomodements avec la réalité". Et pourtant il ne manque pas de lui adresser un vibrant plaidoyer pour la tolérance : "Je dois retrouver Djami, là-bas, à Aden. [..] Avant lui, j'ignorais qu'un sentiment pouvait s'insinuer. [...] Un matin, à force de l'avoir à mes côtés, j'ai pris conscience que je ne serai plus capable de me passer de lui. Il y a des hommes qui mettent une vie à devenir ce qu'ils sont : je suis de ceux-là. [...] Tu n'imagines pas les resistances que j'ai dû vaincre, les inhibitions qu'il m'a fallu surmonter, les illusions que j'ai été contraint d'abandonner pour seulement m'accepter en amoureux. [...] Et si toi, qui a été élevée dans une ferme, avec la bonne odeur de foin et la boue qui colle aux chaussures ; toi, qui a été jetée vers Dieu comme on précipite une portée de chiots morts à la rivière, dans un sac ; toi, qu'on a maintenue dans l'ignorance et la bigoterie ; si toi tu consens à admettre une aventure humaine comme celle-ci, alors il existe des raisons de ne pas desespérer tout à fait. Voudras-tu me laisser un peu d'espoir." [Ph. Besson, Les jours fragiles, p 149-150].

Malgrè tout, l'idée de ce roman est excellente et son développement abouti de main de maître. On retrouve ici toute la plume de "L'arrière saison". Un régal à lire, avant de se replonger dans l'oeuvre de l'homme aux semelles de vent.


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