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Maguy DUMAS,mai 2003.
Les adultes sont des gâcheurs
d’enfance. Et il arrive un jour où l’on ne peut plus
dire « maman » comme autrefois. Pour Alexandre, jeune homme
lunaire et effacé qui vit dans l’ombre de cette figure
tutélaire, le mot même a un goût de fiel. Il retrace
néanmoins avec amour le portrait de cette femme envahissante
et gentiment cruelle. Son récit avance par petites touches, comme
silencieux. Une douleur sans cri, une tendresse presque sans espoir.
Tout, ici, est tranquillement poignant.
Je suis tombée par hasard sur ce livre qui viennait de paraître
« Maman » … J’ai d’abord été
troublée par la couverture, extrêmement belle. Mais le
plus troublant fut après, à la lecture. Je suis encore
sous le coup de l’émotion après avoir lu ce roman
que j’ai reposé sur la table hier au soir. Ce récit,
extrêmement poignant, fort en émotion, traite de la "vie"
et de ses secrets dont nous sommes tous un jour ou l’autre victime,
bienheureuse ou malheureuse. Ce livre, c’est un livre d’amour,
c’est un témoignage de l’ineffable mystère
de l’être humain, être de parole qui, en rien, n’est
semblable dans son destin au destin des autres créatures de cette
terre. Ce livre, duquel je ne suis pas sortie intacte est un témoignage
troublant, rare. Un livre plein d’espoir.
Ce premier roman a toute la pudeur, et c'est là toute sa force,
aujourd'hui où tous veulent bien étaler facilement dans
les détails les plus glauques. Dans une ériture impeccable,
belle, mesurée, l'auteur nous fait travailler, nous fait réfléchir,
nous donne les réponses, tout en subtilité, tout en nuance.
Voilà ce qui fait que ce "Maman" est à part,
retient l'attention, marque les esprits. Comment ne pourrait-on pas
aimer un texte pareil ?
- Christine
LAURE,novembre 2003.
J'ai été
séduite par la grâce de cette écriture. Par ces
fenêtres que l'auteur nous ouvre en silence sur un jardin à
la fois secret et universel. Un jardin aux fruits doux amers. Après
avoir fini la lecture de ce livre attachant, j'y reviens, j'en savoure
quelques moments lumineux et je ferme les yeux pour en retenir le parfum.
le
site de Christine
A travers le web :
www.litterature.net,
note de lecture de -
Alice GRANGER GUITARD,
mai 2003.
NB : nous nous sommes permis de retranscrire
la note de lecture d'Alice, car elle est maginifque.
Après avoir
lu ce premier roman de Benoît Montenat, je me suis dit : c'est
curieux, moi, je lui aurais donné pour titre plutôt…
Papa.
Tout semble condensé sur maman, à travers ce qu'en écrit
son fils, depuis qu'il est né, et qu'au château est arrivée…Micha,
pour s'occuper de lui jour et nuit. Maman veut pour son fils ce qu'il
y a de mieux. Elle l'exhibe, lors de nombreuses réceptions au
château. Une poupée ou un bébé? Un petit
prodige d'intelligence?
Papa, c'est quelqu'un qui se tient définitivement dans l'ombre,
ne dit rien, cède même lorsqu'il n'est pas d'accord sur
le choix du prénom de son fils.
Papa, c'est quelqu'un qui semble avoir dit oui définitivement
à maman, à ses fantaisies, à ses caprices, à
son hystérie, et, sans même dire que tout ceci l'ennuie
énormément, se tourne vers sa double vie, tout aussi définitivement,
et là maman n'y peut rien, cela se passe sous ses yeux, c'est
presque imperceptible, mais cela se décolle irrémédiablement,
jour après jour. Maman regarde papa, regarde papa regardant Micha,
c'est presque rien, c'est la séparation annoncée, maman
ne va pas finir d'être forcée d'admettre, tout en se faisant
croire que son caprice va avoir raison de ce qui unit papa et Micha.
Bien sûr, et c'est tout l'intérêt de ce roman, ce
non dit si présent, rien de l'histoire de papa avec Micha, qui
mine peu à peu, l'air de rien, maman, n'est raconté. La
double vie de papa, c'est-à-dire sa vraie vie, reste invisible,
mais sa conséquence s'écrit sur maman, et sur la relation
de maman avec son fils. Papa, elle n'en finit pas de soupçonner
qu'il aime Micha, elle n'en finit pas de regarder une scène originaire
d'où elle est si violemment absente, mais son fils, lui, elle
le tient, ne me quitte pas lui dit-elle, ne me quitte pas, tandis qu'elle,
de passion mélancolique, le quitte.
Au château, les années où papa et maman sont encore
ensemble, la journée maman n'a envie de rien. Elle fume. Puis,
en fin de journée, son génie du commandement se réveille.
Elle fait comme si elle pouvait tout ordonner, tout réanimer,
comme si tout lui obéissait au doigt et à l'œil,
tandis que juste avant sans doute elle constatait que tout lui échappait.
"Maman commande avec l'habitude de ne pas voir sa volonté
tenue en échec". Les amis arrivent, tout s'anime jusqu'à
tard dans la nuit.
Le matin, papa et maman dorment encore, et le petit garçon est
libre de jouir de l'activité domestique au château, Il
adore Hubert, là comme son père ne l'est pas, vrai patriarche,
composant la cuisine, lui apprenant la nature, les bois, les fleurs.
C'est un enfant du pays, entre la Normandie et la Bretagne. Merveilleux
instants de liberté qui font perdre la notion du temps. Il est
avec Hubert, dans la nature, il est avec cet homme comme il aurait voulu
être avec son père, et surgit Micha, inquiète de
ne plus voir l'enfant dont elle doit s'occuper jour et nuit. Micha et
Hubert incarnent la matérialité des parents qu'il voudrait
avoir, mais ce bonheur-là n'est qu'entre parenthèses.
Lui, le fils, est au contraire totalement traversé, imbibé,
ballotté, par ce qui ne va pas entre ses parents. On dirait qu'il
a été conçu pour mesurer, dans sa chair même,
dans sa sensibilité, le degré d'avancement de la séparation
de son père et de sa mère. Plus exactement, pour mesurer
l'avancée de l'admission par sa mère de l'éloignement
de son père. Ce qui enveloppe jalousement, possessivement, passionnément,
de manière matricielle, le fils, c'est l'illusion que garde encore
maman que papa l'aime elle, pas Micha, et puis, quand la séparation
aura eu lieu, que papa reviendra. Toute l'illusion capricieuse, hystérique,
et finalement mélancolique de maman à l'égard de
papa, tout son refus d'admettre que sa vraie vie est en dehors d'elle,
se matérialise en une sorte de matrice possessive gardant en
elle son garçon, une matrice dont la mort est pourtant annoncée.
Le fils raconte atrocement bien le secret de sa naissance. Le secret
de la séparation annoncée du couple parental, retardée
grâce à lui pendant le temps que la mère prendra
à l'admettre, fille qui sera forcée enfin d'accepter de
ne pas être dans le lit avec son père-mari en y évinçant
sa mère-Micha. La symbiose incestueuse du fils avec sa mère,
surtout lorsqu'elle vient à Paris vivre avec son fils, ne double-t-elle
pas en effet, même si là aussi cela n'est pas dit, l'attachement
incestueux de la mère avec son propre père? C'est en effet
curieux ce regard de maman qui, furtivement, regarde une femme, Micha,
avec papa, la voit très bien, inquiète, agacée,
angoissée, désespérée, se retrouvant petite
fille dans l'impossibilité d'éliminer sa propre mère
pour avoir son propre père tout à elle. Ce roman réussit
de manière remarquable, et tout dans le non dit qui se reflète
dans ce qui est dit, par petites touches, à montrer qu'une nouvelle
naissance, ici le fils, remet sur le métier un problème
laissé en plan à la génération précédente,
et permet d'avancer ce travail. Pourquoi naît-on? Pourquoi maman,
surtout, mais aussi sans doute papa, ont-ils désiré ma
naissance? Ce pourquoi, tout en non dit, traverse le roman.
En fait, tout ce roman, cet intéressant premier roman, ne raconte-t-il
pas cette mort annoncée, cette décomposition placentaire
de maman partie dans l'éternel sommeil barbiturique justement
dans cet appartement parisien qu'elle partageait avec son fils? Maman
se suicide, en fait la bulle matricielle se décompose, après
que maman a vu papa avec Micha dans la rue, un couple très amoureux,
le doute n'était plus permis, et le fils est alors tombé
lui aussi de cette symbiose passionnelle avec maman.
Le fils, dans ce roman, n'en finit pas non plus de voir les choses,
les bonnes choses, finir, ne se connaissant de corps et d'âme
qu'entre les mains d'une volonté extérieure ayant le pouvoir
de la pluie et du beau temps sur lui, que ce soit sa mère, et
puis ensuite Romain l'infidèle lui écrivant des lettres
tous les jours, revenant repartant, l'homosexualité. Le fils
a perdu Hubert, pendant son enfance, alors que déjà son
père était inexistant. Ensuite, Lucie la tendre amie du
château, finit elle aussi par mourir.
Que reste-t-il au fils? Et bien ceci dans le roman ne se dit pas plus
que la double vraie vie du père, que l'on sent pourtant très
réelle. Alors parions que le fils désormais va écouter
la version de papa, grâce à qui enfin la bulle matricielle
tyrannique a achevé son apoptose.
- resonance-online.com,
(Note de lecture de Victor,
juillet 2003) site très ergonomiqe sur lequel les internautes
peuvent exposer leurs coups de coeur.