Emmanuel LEPAGE

Tome 1 ;
Nicaragua, 1976. Le pays est gouverné par le "président" Somoza, avec le soutien actif de la CIA. La Guardia, police para-militaire, fait régner la terreur dans le pays. Les maquisards sandinistes se réfugient dans la jungle tropicale d'où ils perpétuent leurs coups de main contre la junte militaire et les intérêts US.
Gabriel de la Sernà, jeune séminariste issu d'une grande famille proche du président, arrive à San Juan, paisible village de brousse, où ses talents de dessinateur et de peintre l'ont appelé. Il doit effectuer une fresque sur les murs de l'église du village à la demande des autorités religieuses. A San Juan, Gabriel fait la connaissance du père Rubén, le curé local, quelque peu hors-norme. Il rencontre aussi Diego, jeune paysan, inculte et batailleur, mais beau comme un soleil, sensuel comme un soir d'été. Diego, qui passe certaines soirées entre les jambes de Concepcion, une jeune fille du village, qui ne refuse pas ses charmes. Gabriel, perché sur le clocher, espionne les deux amants, et croque Diego sur son calepin. L'irruption de la Guardia et la présence des sandinistes au sein même du village viennent troubler la trompeuse quiétude, et entraînent Gabriel dans la tourmente.
Tome 2 ;
La tourmente a emporté Gabriel dans la jungle, aux trousses d'une poignée de "rebelles", et surtout sur les traces de Diego. La meute des chasseurs de La Guardia est derrière eux. Cette fuite dans la jungle lui fera côtoyer l'enfer, la peur, la mort, l'amitié, et puis l'espoir, et puis ... l'amour.

BD très agréable à lire. Le scénario est original et solide, l'histoire est bien construite et documentée. Les personnages sont très bien étudiés, sans parti pris. Le thème de l'homosexualité est abordé avec la même délicatesse, et amené avec le même tact que dans Névé (BD pour laquelle Lepage avait exercé ses talents sur un scénario de Dieter). La découverte de son identité profonde par Gabriel se fait graduellement au gré de l'histoire. Confronté à cette découverte et aux situations de plus en plus périlleuses, le personnage de Gabriel, centre du récit, est en perpétuelle évolution, en perpétuelle adaptation, et les différentes phases de cette évolution sont traitées avec inteligenceet maestria.
Les dessins sont de grande qualité, les personnages se ressemblent bien d'une image à l'autre et d'un tome à l'autre, mais Emmanuel Lepage n'est pas n'importe qui, et ce ne sont pas ses premières armes en BD (cf. Névé). Toujours une grande recherche dans l'illustration des décors, très réalistes. Et encore des couleurs magnifiques, les tons variant avec la situation (bien vu !).
Bref une série à lire et à relire, pour tous, quelque soit l'orientation.