Brice, jeune stewart des wagons-lits, amateur de musclette encuirée de prépuces de cachalots, vit une nuit torride avec Nicolas sur le Paris-Venise. Ce dernier, seul en voyage de pacs, avec sa panoplie complète de cuirs prépuciens de toutes les couleurs, se remet (de façon sacrilège) dans les bras d'un jeune peintre vénicen de sa nuit d'enfer avec Brice, et lui offre le billet de son ex-futur mari. Sébastiano suit donc Nicolas sur l'Orlando furioso , et s'initie au SM ludique entre les mains d'un maître Belge, aux accords de Tosca, version 1953, celle de La Callas s'il vous plait ! Après l'initiation magistrale de Séb, Cyril, également expert de la logique floue et défenseur de la théorie bouléenne, entreprend la formation de Gontrand Cavalier, honteuse d'extrême droite, bras droit de Bernadette Biroutin*, pseudo-passionaria homophobe protectrice de la sainte famille. Malmené, Gontrand, la queue entre les jambes, s'essaie à Lionel, entraineur de lutte gréco-romaine, et à Patrice, son poulain, mais découvre Alphonse, son fils aîné, déjà entre les jambes de ce dernier.... Olivier, commandant en second du navire, introduit Lionel et Patrice (les lutteurs) aux frères Karamazoglou, lutteurs turcs, lors d'une rencontre titanesque. Plus tard, n'écoutant que son devoir, Olivier sauve d'une débandade suicidaire William, golden boy Américain issu d'une famille méthodiste, en voyage de noce sur l'Orlando, qui n'ose se laisser aller à ses penchants naturels. Finalement, William demande le divorce, et pour fuir la vindicte de sa femme, il décide de s'exiler à Paris. Au retour à Venise, notre Second confie donc William pour le retour vers la capitale à ... Brice, jeune stewart des wagons-lits...

* et 3 de pourfendues d'un seul coup.

Vous l'aurez compris, dans ce court roman, on saute le coq et l'âne.... Mais ne vous y trompez pas, H&O annonçaient (sauf erreur de notre part) un livre érotique : si on s'encule dans toutes les écoutilles de l'Orlando, de roman érotique il n'est pas question. Pour l'érotisme, nous vous renvoyons toujours vers le très bandant Loïc.
Non, ici, ce serait plutôt gros délire, et c'est aussi bien comme ça. On pouffe franchement en suivant les tribulations de tout ce petit monde, de récit de Brice en histoire de Nicolas, de narration d'Olivier en initiation de Sébastiano. Petite baisse de rythme vers la fin, quand la bouffonade tourne à la tendresse, mais la tendresse... alors on laisse reposer les zygomatiques pour verser une larme attendrie. Si vous ne riez pas lors du dialogue croisé au cours de la réception d'accueil, essayez de vous pincer ou .... prenez rendez-vous avec Cyril pour une petite séance ! Ne manquez pas non plus l'hallucinante (car véridique) explication des tenants et aboutissants de la guerre d'Irak (p110 -111).

Style léger, vocabulaire riche, même si les mots ne sont pas machés (un chat s'appelle bien un chat, mais ne vous inquiétez pas, il n'y en a pas beaucoup dans ce roman !), nombreux signes d'une excellente érudition, ce roman est agréable à lire. Bonne idée de donner la parole à chaque chapitre au nouveau personnage du chapitre précédent. Effet attendu : on revient finalement à Brice, mais tout attendu qu'il est, l'effet est excellement maitrisé. Et puis un auteur qui descend en flammes les architectes fin 20ème, champions du tout verre-métal-béton-gris-caca, crade et inhumain, un auteur qui pourfend les idéologues arriérés et sûrs d'eux, moi j'adhère....
"... la révélation du marxisme, de la psychanalyse, de Barthes, de la sociologie, du structuralisme et de quelques autres merveilles [...], à mon humble avis, ne valent pas toutes ensembles une bonne branlette".

Juste un reproche : pourquoi une couverture aussi tarte ? Une page de garde plus originale et plus drôle aurait été mieux vue et plus au diapason du livre !

Si vous avez besoin de souffler entre 2 romans, 2 films, 2 pièces (ou autres) pas rigolos rigolos, ou si vous voulez décompresser en ces fêtes de fin d'année après un travail stressant : voilà, vous avez trouvé ; ne cherchez pas plus loin.
Bonne récréation.