Pour mon plaisir et ma délectation charnelle
Auteur Pierre COMBESCOT Lecture Novembre 2009
Edition Grasset Création Fiche Décembre 2009
Parution 2008

 

Origine  
Traduction  


Gilles de Montmorency-Laval (1404 - 1440), Comte de Brienne, Baron de Rais, Maréchal de France, compagnon de Jeanne d'Arc, descendant d'une illustre, riche, et puissante famille de France. Après s'être illustré dans les combats qui menèrent Charles VII de Valois sur le trône de France, au grand dam du roi d'Angleterre qui briguait le titre, Gilles de Rais s'enfonce dans la barbarie, la violence. Il tue, il viole, surtout des jeunes adolescents tout juste pubères, issus de familles pauvres. Il les pénètre sauvagement, et les tue au moment de sa jouissance ; il mutile et dépèce les cadavres. Poursuivi par un inquisiteur, il sera jugé et pendu pour ces méfaits.


La plume, le style, l'érudition de Pierre Combescot font de ce roman un vrai plaisir et une délectation certaine. Tout est documenté, et, à l'instar de Maurice Druon et ses rois maudits, Combescot réussit un excellent roman historique. Rien à dire ! Une lecture à conseiller donc pour les amateurs d'Histoire et d'histoires.

Il n'en reste pas moins que Combescot part sur le postulat que Gilles de Rais est coupable et a commis les crimes qu'on lui reproche. Ces faits ont été par la suite contestés, et son accusation par l'inquisition remise en question. D'aucuns pensent que Gilles de Rais aurait été pris en étau dans la lutte entre le roi de France (Charles VII) et le duc de Bretagne (Jean V de Montfort), nombre de ses fiefs étant situés aux Marches de Bretagne. Lui-même était vassal de ces deux puissants seigneurs pour l'un ou l'autre de ces fiefs. L'église intervenant pour se venger d'humiliations perpétrées par Gilles contre certains membres du clergé, et pour récupérer également quelques territoires.

Extrait de l'article de Michel KURZ (Acropolis) faisant référence à la monographie de J.-P. BAYARD (Ed. Soleil Natal) :

[...] L'histoire "officielle" est aujourd'hui fréquemment dénoncée, voire confondue, par des recherches nouvelles, le plus souvent empreintes d'une grande rigueur, et qui conduisent à des conclusions diamètralement opposées à celles communément admises jusqu'alors. Les thèses consacrées à la réhabilitation de divers personnages, parmi les plus illustres, condamnés et souvent suppliciés, à diverses époques, parviennent de plus en plus fréquemment à rallier l'opinion, à défaut de modifier à court terme le contenu des manuels scolaires.
Rappelons brièvement ce que l'histoire a retenu de Gilles de Rais : né à Champtocé en 1404, vassal du Duc de Bretagne, il se met au service du Roi de France Charles VII dès 1427 ; compagnon d'armes de Jeanne d'Arc, il est fait Maréchal de France en 1429. Après la mort de Jeanne en 1431, il poursuit la lutte contre les Anglais jusqu'en 1435, puis se retire sur ses terres où il mène une vie fastueuse. Pour satisfaire son goût du lucre et ses énormes besoins d'argent, il n'hésite pas à recourir à l'alchimie et à la magie noire ; un procès retentissant, suivi de son exécution le 26 octobre 1440 à Nantes, établira que des centaines d'enfants ont succombé à sa folie meurtrière après avoir subi les affres de ses perversions sexuelles. C'est en substance la version officielle de la vie de cet étrange personnage.
Etrange surtout par l'incroyable opposition entre les deux moitiés de son existence. Certains auteurs ont avancé l'hypothèse que le très pieux Maréchal de France aurait voué son âme au diable par dépit ou désespoir après la mort de Jeanne : "Puisque Jeanne, la sainte, a été condamnée, suppliciée, il ne faut plus croire en la religion, en Dieu, et ainsi il s'en remet au Diable". En fait, seuls les termes du procès permettent d'étayer une telle hypothèse, car plusieurs années après la mort de Jeanne, en 1435, on le trouve encore au combat contre les Anglais et, la même année, il fonde une collégiale à laquelle il consacre des sommes considérables; n'est-il pas, depuis août 1434, chanoine de Saint-Hilaire le Grand de Poitiers ? [...]
Si Gilles de Rais est effectivement innocent des crimes qui l'ont conduit au bûcher, toute la question est de savoir pourquoi il en a été accusé et comment un aussi puissant baron, si proche du roi de France, n'a pu échapper à la terrible machination. Précisement, c'est sans doute dans sa double appartenance à la Maison de France, par conviction, et à la Maison de Bretagne, par sa naissance, qu'il faut chercher la raison ultime de sa perdition. Le Duc de Bretagne, Jean V, même s'il ne s'implique pas directement dans le conflit franco-anglais, ne dissimule pas son penchant pour la cause britannique. Par ailleurs, il convoite les innombrables propriétés et châteaux que son vassal vend sans difficulté pour renflouer sa trésorerie. [...]
De fait, si certaines des raisons qui ont conduit le Duc de Bretagne à perdre son vassal et le roi Charles VII à ne pas intervenir nous resteront à jamais inconnues, le mécanisme de la machination [...] atteste suffisamment de la plus que vraisemblable innocence de Gilles de Rais.

Lorsqu'il est arrêté en sa forteresse de Machecoul, le 15 septembre 1440, par les hommes du Duc de Bretagne, il se rend sans résistance alors qu'il avait grandement les moyens de se défendre. Le seul chef d'accusation qui lui est alors signifié est d'être entré armé dans une église et d'avoir, pendant l'office, molesté et arrêté un homme lige du Duc. Ce sont là moeurs fréquentes à l'époque, que de règler les différents commerciaux de façon expéditive. Cette accusation étant fondée et Gilles ayant probablement reçu du Duc, au cours d'une récente entrevue, des assurances quant à l'issue de l'affaire, le baron, impétueux mais loyal, accepte de comparaître dans le but d'obtenir pardon pour sa faute et réparation dans sa transaction.
Le piège infernal se referme inexorablement sur le Seigneur de Rais : "Arrêté le 15 septembre, il est présenté à ses juges le 19 septembre, mais ce ne sera que le 8 octobre qu'il connaîtra les vraies raisons de son arrestation". Quelles sont-elles ? Meurtres d'enfants, magie noire, commerce avec le diable : Rien que cela ! D'abord révolté par des accusations aussi effroyables et aussi éloignées du motif initial de son arrestation, Gilles nie avec véhémence et récuse ses juges, mais il est trop tard, l'étau s'est refermé.
L'étonnance similitude, presque mot pour mot, entre les dépositions des témoins à charge, montre à l'évidence l'efficacité éprouvée des tribunaux de l'Inquisition en matière d'extorsion d'aveux ou de faux témoignages. Gilles lui-même finira par tout avouer et même plus encore. Le piège aura fonctionné jusqu'au bout : c'est en échange de ses aveux que Gilles obtiendra de n'être pas excommunié, de rester au sein de la communauté chrétienne et, ainsi, d'être inhumé en terre consacrée. Il sait que, de toute façon, il est perdu, mais il préfère, en fervent chrétien qu'il est, rester au sein de l'Eglise qui le condamne, plutôt qu'encourir la damnation éternelle liée à l'excommunication.

Georges BATAILLE (Le procès de G. de Rais, 1965) qui penche pour la culpabilité de Gilles de Rais entrevoit tout de même des causes objectives au procès indépendantes des crimes supposés (cf. Philosophie) :

On peut douter que Gilles de Rais eût été inquiété pour ses crimes d’enfants si ses dettes ne l’avaient conduit à vouloir reprendre par fait d’armes un château qu’il avait vendu au trésorier de Bretagne, le château de Saint-Étienne de Mermorte, Par cette expédition non seulement il violait un contrat signé mais il bafouait les saintes lois de l’Eglise en entrant armé dans une chapelle pour y prendre en otage le prêtre (frère du propriétaire) qui y disait l’office. Dans le même jour Gilles de Rais parvint donc à s’attirer les hostilités du Duc de Bretagne et de l’Evêque de Nantes. N’ayant plus d’appui du côté de ses proches puisqu’il avait par ses folles dépenses gaspillé tout leur héritage, Gille de Rais fut arrêté et conduit à la prison de Nantes.


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