La genèse du film part d'un bon sentiment : rendre hommage à
la mémoire d'un jeune homme lynché par des décérébrés
alcoolisés parce qu'homosexuel, tout en dénonçant
la sauvagerie, la violence, et l'homophobie. Ce faisant le film aborde
plusieurs autres thèmes en filigrane : religion et homosexualité,
communautarisme, rejet familial et homophobie ordinaire (celle qui consiste
à être indifférent à l'homosexualité
dans le showbiz – par ex. -, mais nie la présence d'homos
dans le monde ouvrier ; celle qui se fout de l'orientation du voisin,
mais trouve insoutenable, inacceptable, la gaytitude d'un fils, d'un
frère, d'un père, etc.), dénonciation de la violence
domestique et ses conséquences sur le développement des
enfants, reproduction des comportements familiaux, poids sociétal,
ravages de l'alcool, etc.
Que de bonnes intentions, mais voilà …
Malgré le nombre et la qualité des thèmes, le scénario
est très faible, condensé, concentré sur ces thèmes,
alors il faut remplir. Le réalisateur aboutit à un court-métrage
de 1h32, sorte de docu-fiction reconstitution d'un crime. Le parti-pris
du temps réel, caméra à l'épaule suivant
les protagonistes, ajoute à ce sentiment de longueurs ennuyeuses.
La première partie se perd ainsi dans les méandres des
préparatifs d'une fête de famille. Une meilleure maîtrise
cinématographique et scénaristique aurait permis de présenter
personnages et contexte beaucoup plus synthétiquement et tout
aussi efficacement.
La deuxième partie (scène de violence sauvage, sans laquelle
le film aurait fait un grand ploc) traine également en longueur
et tourne très tôt en rond car lles scénaristes
s'imposent tout de même une certaine autocensure (ce qui est montré
est en deçà de ce qui s'est à maintes fois déroulé
dans de tels cas – et c'est heureux, car finalement on ne peut
pas montrer l'indicible -), La suggestion, le réalisme, et surtout
le caractère plus que plausible (hélas ! car le spectateur
sens bien qu'ici, on pourrait ne pas être dans la fiction) font
la force de cette séquence. Mais cela pose tout de même
une question inquiétante : "à qui cette partie s'adresse-t-elle
?" Cela ne risque-t-il pas d'attirer des illuminés qui pourraient
en jouir, voire s'en inspirer ?!
La troisième partie, reposant sur une idée originale (inspirée
du fait réel ?) que je ne dévoilerai pas, souffre du même
défaut que les deux premières : temps réel, style
reportage, longueurs inutiles, caméra à l'épaule,
dialogues faibles.
Vraiment dommage, car il y avait beaucoup de matière, mais peut-être
peu de moyens ?
On pourrait également
s'étonner qu'un film belge francophone soit affublé d'un
titre en Anglais !?
Pour finir, je soulignerai la présence d'une pléiade d'étonnants
jeunes acteurs plus vrais que nature dans des rôles difficiles
: car rejouer "Orange Mécanique" ne doit pas être
simple. Bravo à eux, notamment à Vincent Overath.